[HS] Memento quia pulvis es

closeUne année au moins est passée depuis la publication de ce billet qui peut donc contenir des informations un peu datées.

Tu es entré dedans le silence de la cave, et rien n’a remué, que la trame de ton âme. Autour de toi, la pâle lueur de l’ampoule sculptait plus d’ombres que de lumières, dans le reflet d’une présence évaporée. Tu as tourné très lentement sur tes talons le temps de tout inscrire dans ta mémoire, et tu as remarqué que l’espace était plein de ta seule respiration.

Tu as farfouillé au hasard dans ce qu’il demeurait de lui. Dans une caisse, tu as trouvé des centaines de lettres, mais tu n’as même pas ouvert la première des enveloppes. Tu sais depuis toujours que les mots morts doivent demeurer dans leur silence.

Tu as pensé aux rires des absents. Tu as regardé le tas de choses que l’on devait encore jeter, tous ces objets qui paraissaient bien plus vivants que toi. Tu n’as touché à rien, et surtout pas aux livres cornés relus sans cesse. Tu as senti, comme à chaque fois que tu visites une maison vidée de tout, que nous sommes inscrits à jamais dans ce que nous avons touché.

Dans un coin, quelques bouteilles de vin finissaient de donner aux anges leur part. Tu as pris le flacon le plus ancien, tu as décidé de le boire plus tard, en souriant au soleil ras qui baignait la vigne le jour où les raisins ont été prélevés.

Tu as remonté l’escalier qui menait vers l’entrée. Le mur était râpeux. La porte s’est refermée derrière toi. Nos vies tiennent dans des boîtes vides.

Ce texte est paru dans le tout récent n°40 de la revue Diérèse,
accompagné de cet autre fragment.
Une revue papier.
Tout fout le camp…

0 thoughts on “[HS] Memento quia pulvis es

  1. La fuite du temps, les topoï de la mémoire et de l’absence, l’universalisation du vécu, la distanciation énonciative par le truchement de la 2e personne, tu étais prédestiné à la douceur angevine.
    Chapeau bas pour ce fragment lyrique.

  2. Mince ! j’avais pas compris que c’était de toi ! j’étais déjà sous le charme de “marcher dans le vilage”
    Comme LiberLibri : chapeau bas ! C’est désespérement beau.

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