Le Tiers absent

closeUne année au moins est passée depuis la publication de ce billet qui peut donc contenir des informations un peu datées.

(Mise à jour) Ce qui suit est un billet politique. L’âge du capitaine, on s’en fout. Je parle d’adaptabilité personnelle et surtout de changement métier et structurel dans les boutiques. Les cas individuels n’ont pas vraiment d’importance en l’espèce (on connaît tous des vieux geeks, des jeunes vieux, des contre-exemples, etc..)

Grosse interrogation chez moi en ce moment : comment sortir du piège geek ? Explications :

  • le concept de bibnum et/ou même d’hybride me semble en fait contre-productif : il trace une ligne plus ou moins visible entre les In et les Off, ceux qui utilisent ces outils et les maîtrisent, ou pas ;
  • cette ligne joue, je le crains, un rôle de frontière voire de repoussoir ou de refuge : qui ne veut pas la franchir peut facilement utiliser l’argument du “je ne sais pas, je n’y comprends rien, ce n’est pas mon affaire ni mon domaine” pour éviter la confrontation avec le numérique.

Or il est évident que l’on ne peut plus éviter le numérique dans le quotidien des bibliothèques (si vous êtes en bibliothèque et que vous n’avez pas compris ça, c’est le moment ou jamais de comprendre ou de changer de job).

Il faut donc absolument dissoudre dans les faits cette frontière numérique vs pas numérique.

Je pense que 1/3 des effectifs minimum doit être numérique friendly (savoir utiliser tout ça sans se faire des suées ; avoir des capacités de débrouillabilité) et considérer un ordinateur comme un outil aussi banal qu’un stylo ou un chariot (vous ne demandez pas de l’aide pour changer la cartouche de votre stylo, alors vous devriez pas avoir de besoin d’un ‘geek’ pour voir pourquoi vos mails n’arrivent plus).

Par ailleurs, les recrutements doivent maintenant intégrer cela vraiment (et je ne parle pas tant d’une vague connaissance d’un traitement de texte que de la curiosité et des capacités à apprendre ces outils, à les utiliser, à savoir accompagner les usagers pas si digital natives que ça).

On se contrefiche d’avoir des catalogueurs ou des spécialistes de Rameau ou des théoriciens des bibliothèques dans nos boutiques, on a besoin de collègues qui (par exemple) :

  • savent trouver pourquoi le PC ou le Mac de l’étudiant n’accroche pas le wifi ;
  • osent regarder les outils du SIGB pour voir ce que le logiciel peut faire d’autres que les procédures super rodées auxquels on est habitué ;
  • etc (ad lib.)

Bref, on a besoin de professionnels de ce siècle, à l’aise avec les outils de ce siècle.

52 thoughts on “Le Tiers absent

  1. On a aussi besoin de professionnels qui ont appris que Beethoven n’est pas seulement un gentil Saint-Bernard encombrant, ou que la philosophie contemporaine ne se résume pas à Bernard Henry-Levy. S’il faut savoir comment brancher les tuyaux, et amorcer la pompe, il faut aussi pouvoir tester la qualité et la diversité des contenus.
    Je reste attaché au concept de bibliothèque hybride : “Ce concept reconnaît donc que ni les services « traditionnels », ni les services électroniques ne sauraient en eux-mêmes constituer des solutions appropriées.” (Peter Brophy , bbf 2002 – Paris, t. 47, n° 4).

  2. Pour moi, le nerf de la guerre est que ça fasse partie du quotidien, pas que ce soit une option facultative… Cela dit, on aura toujours besoin de catalogueurs et de spécialistes rameau tant qu’on n’aura que ça pour chercher par sujet 😉 Et ne me dis pas que les étudiants ne cherchent pas par sujet, je les vois faire ! Sans compter nos propres recherches quand ils nous demandent de l’aide.
    Lors d’un stage passionnant, une enseignante, qui avouait entre autres ne pas savoir faire de ppt mais consciente de l’enjeu des technologies, nous avait dit qu’il faudrait une génération pour que les choses changent. Je l’avais trouvé pessimiste à l’époque mais je commence à penser qu’elle avait bien raison…

  3. Grain de sel : on peut ne pas confondre Beethoven avec un chien ET se débrouiller tout seul avec Ppt, Zotero et même Pearls ou GanttProject, ou Numilog, ou Generalis (!!), pour ne citer que des trucs assez quotidiens. A tout âge et de toutes conditions (la question générationnelle est un faux nez). Je suis la plus vioque de mon équipe, et pas spécialement “geek” (d’ailleurs, voyez j’ai du mal à l’écrire sans “”), mais c’est moi qu’on vient chercher parce qu’une étudiante n’arrive pas à ouvrir sa session Windows : ça m’amuse, mais ça m’inquiète , aussi.
    Car la débrouillabilité (je peux l’adopter, ce mot, pour mon vocabulaire pro, y’a pas de brevet là-dessus ??) ça n’est en effet, pas donné à tout le monde. Hélas.
    Complètement d’accord par ailleurs sur les recrutements. D’accord aussi sur la dissolution de la frontière.
    Mais pas complètement d’accord sur les “spécialistes” : ça dépend des boutiques, il y a aussi besoin de spécialistes (mais pas autant qu’on veut bien le croire; et n’est pas non plus spécialiste qui s’autoproclame…).

      1. Et juste pour dire, y’a pas pire sourd que celui qui a bien chaud dans ses moufles, comme dirait Beethoven

      1. Oui, mais alors il n’y aurait plus de référence à la “bidouillabilité” (hackability) chère à M. Tristan Nitot dont l’un des concepts fondamental est de ne pas (plus) subir l’outil mais bien de s’amuser avec lui, comprendre ce qu’on peut en tirer, quitte à le détourner [http://www.slideshare.net/nitot/bidouillabilit-pourquoi-il-est-essentiel-de-pouvoir-bidouiller-internet].

        Sur ce, je dois me remettre à préparer mes concours et mon catalogage point tiret, car en effet, il n’y est nul part prévu de tester ma culture numérique… Un comble pour un métier au cœur des sciences de l’information.

  4. Pour briser la ligne de rupture entre technophiles et technophobes, il y a de nombreuses méthodes.

    La plus intéressante est certainement de leur faire faire des choses ensembles en inversant les rôles.

    Bien sûr, faut former les technophobes. Faire former les technophobes par les technophiles. Et plus encore faire former les technophiles par les technophobes.

    On peut faire faire plein de choses technologiques à technophobe pour peu qu’on l’accompagne un peu et qu’on écoute ce qui l’intéresse. Car il ne viendra à la technologie que par l’angle qui l’intéresse. Autant dire que tout le monde ne saura pas réparer le Wifi qui ne capte pas. Je ne pense pas que ce doive être le but. La force des équipes reposent sur leurs complémentarité, non ?

  5. Oui => jeu, design, papier => passer par autre chose pour montrer/susciter l’intérêt. L’écran et la souris ne sont qu’une interface, non ? C’est cela qu’il faut faire comprendre aux technophobes. Les technophiles doivent juste se mettre à niveau parfois… 😉

    1. 🙂
      Je trouve quand même dramatique qu’une profession soit ainsi à la traîne et que j’ai même à dire le genre de platitude que j’exprime ici.
      Bref.

  6. Je pense que l’on fait fausse route lorsque l’on trie entre deux “camps” : d’un côté les technophiles et de l’autre les technophobes. Les gens bien d’un côté, les ringards de l’autre. Bien entendu, on est du bon côté, on est tout naturellement dans le sens de l’histoire, et on peut donc être condescendant vis à vis des réactionnaires qui sont de l’autre, sans qu’on ait besoin de se poser plus de questions que cela, sans essayer de comprendre d’où ils viennent. Des fois, je me sens classé du côté des ringards, et ça me rend encore plus hargneusement ringard. Vous voyez ce que je veux dire ? Il faut faire attention à ce qu’on dit, à qui on le dit, de quelle façon on le dit, et de quel point de vue on se place, vous ne croyez pas ?
    La ligne de séparation, elle existera d’autant plus qu’on aura envie qu’elle existe.
    Bon, j’ai déversé mon fiel, je vais pouvoir être maintenant un peu plus mesuré.
    Bien sûr qu’il y a des collègues qui ne sont pas aussi geeks que d’autres. Que faut-il faire, les tuer ? Les virer ? Les flanquer vite fait bien fait au chômage ? Et bien non, il faut faire avec, et il faut aussi savoir entendre ce qu’ils ont – éventuellement – à dire. On peut aussi, évidemment, essayer de les convaincre, et de les attirer sur notre propre terrain, mais on ne pourra espérer réussir que si l’on accepte a priori d’être aussi critiqué, voire convaincu, par eux. Faute de cela, la ligne séparatrice va se durcir fortement, et cela ne profitera à personne. Essayons au contraire de ménager le maximum de brèches dans cette ligne. essayons d’accepter que, parfois, nous allons trop loin, que nous pouvons en arriver à être puants de suffisance. Alors, le nombre de “technophobes” indécrottables pourra commencer à diminuer.
    Je parle en mon nom propre, bien sûr, sans engager une certaine association d’aucune façon que ce soit…

    1. “Il faut donc absolument dissoudre dans les faits cette frontière numérique vs pas numérique.”, c’est exactement ce que je dis.
      Mais je dis aussi que cette frontière peut arranger bien du monde : nous avons tous de bonnes raisons de ne faire aucun effort.

    2. Mais je pense aussi qu’il faut un peu secouer les puces du métier – le côté “eau tiède on a tout le temps n’allons pas trop vite restons neutre etc.” va nous tuer.

    3. Faire avec, écouter, autocritique, persuasion réciproque : c’est tous les jours comme ça, hein, faut pas croire…
      Parce que, de fait, je ne vois pas personnellement ce que je peux faire d’autres : virer, pas le pouvoir; tuer, ben faut y réfléchir…; ostraciser, ça me plaît pas trop… :-)))
      N’empêche.
      Le débat, je crois, n’est pas entre ringard et pas ringard. Ce n’est pas une question de mode, mais de nécessité. Le débat serait donc plutôt entre je-bouge-mon cerveau-et-mes petits-doigts-tous-les-jours et j’ai-passé-le-CAFB-en 1970-et-ça-m’suffit

      1. J’ai passé le CAFB en 1979, je ne sais pas si ça suffit, mais je ne trouve pas la remarque de Mrs Bean des plus propices à continuer le débat. À une prochaine.

        1. Je pense que l’idée était surout (pour tout le monde) de continuer à se former même après le diplôme ,qu’on soit jeune ou plus ancien. D’ailleurs les jeunes d’aujourd’hui sont les futurs anciens et ils passeront aussi pour ringards s’il ne prennent pas la peine d’évoluer avec leur époque.

          Mais il est vrai qu’au présent ils ont un peu plus facile avec les nouvelles technologie (bien que cela ne soit pas une généralité, j’ai des amis très frileux avec l’informatique). De plus, les formation actuelles de bibliothécaire-documentaliste (à Bruxelles en tout cas) prennent de plus en plus en compte cette nécessité d’avoir à la fois une solide connaissance générale et une certaine aisance avec l’outil informatique.

          Cependant, si nous ne faisons rien de cette facilité en nous “mettant à jour” nous deviendrons nous aussi arriérés.

          1. Pour faire suite au commentaire de Sous la poussière : le refus de l’autoformation est effectivement une faute professionnelle. Toutes les professions exigent qu’on se tienne au courant des avancées ayant un impact sur le métier. Les médecins organisent des congrès thématiques par spécialité, lisent la presse médicale qui présente les dernières évolutions. Ca paraît normal à tout le monde. Ben les bibliothécaires c’est pareil. Je ne vois pas ce qu’il y a de choquant dans ce concept.

          2. et puis y en a marre des gens qui se braquent et veulent faire croire que la critique qui leur est faite porte sur leur prétendu grand âge et non sur leurs lacunes. Prenez cette jeune grand-mère dont je tairai le nom, avec qui j’ai travaillé quelques temps sur un dossier de fusion de SIGB : bon, ben on peut avoir passé 50 ans et n’être absolument pas dépassée par l’informatique, sous réserve d’avoir fait preuve d’un peu de curiosité professionnelle tout au long de sa carrière.

      1. Je vois… Et quand tu veux un peu corser ton café, tu le tailles. Pratique ! Au moins avec ça, pas de danger de devenir alcolo en ajoutant du Cognac…

          1. Par quelque chose de meilleur encore par exemple… C’est donc de là que vient l’expression “encre sympathique”. J’aime !

  7. S’ouvrir sur de nouveaux profils qui nous ouvrirons à de nouveaux publics et nous ferons prendre conscience du monde qui nous entoure je vote pour. Et arrêtons de théoriser faisons!

  8. J’ai beaucoup de respect pour les titulaires du CAFB. Quel que soit leur âge (professionnel). Ne me faites pas dire ce que j’ai pas dit ! Le prob. c’est “ça m’suffit”, pas le CAFB ni les années 70, b…el !! Oh, pardon, ils m’ont énervée, là.
    ça me fait penser à des maisons par ici (par ici les maisons portent souvent un nom) qui s’appellent Azkena = la dernière… C’est d’une tristesse.

  9. Il n’y a pas que l’âge qui compte c’est clair, mais on reste quand même dans le cas individuel ET toujours le même débat : catalogage, indexation VS le reste.
    J’ai le sentiment qu’en proposant de faire de faire tomber des barrières tu en élèves d’autres :
    “On se contrefiche d’avoir des catalogueurs ou des spécialistes de Rameau ou des théoriciens des bibliothèques dans nos boutiques, on a besoin de collègues qui (par exemple) …”
    Réduire de nouvelles fonctions à réparer le wi-fi est… réducteur ! C’est borné notre métier, en offrir une vision vraiment très pauvre et conforter l’idée que oui tout le monde peut être bibliothécaire : tu sais lire, tu sais réparer le wi-fi et tu as de gros…. Ok je sors 😉

  10. Grosso modo d’accord sur le fond et sur la nécessité de se mettre à jour. Mais on a aussi un vrai pb avec les formations initiales. Si dans l’ensemble les “historiques” ne s’en sortent pas trop mal, je trouve regrettable que des initiatives comme celle de Rouen (cursus Ingénierie de l’Information Electronique) soient tombée à l’eau faute de candidats (cf ma prose chez Territorial et cf Clotilde Vaissaire.
    Et puis je crois que pendant quelques temps encore, il va falloir faire avec ceux qui choisissent les filières bib-doc-archives parce qu’ils aiment les livres (sous-entendu papier).
    Parenthèse “ancien combattant”, lorsque j’étais en histoire mention doc il y a presque 15 ans, certaines nanas de ma promo allaient à reculons en cours d’informatique (bureautique en fait) en disant que de toute façon elles n’en n’avaient pas besoin puisqu’elle feraient taper leur mémoire de maîtrise… Liberlibri n’a pas tort : une génération, minimum…

      1. La seule chose que j’ai retenu de mes cours de management et qui me revient à l’instant : “le changement, ça se passe toujours mal !” Vous aurez beau le prévoir, l’accompagner, ça entraînera toujours des réticences et des peurs. J’y repense parce que, depuis une quinzaine d’années que les “nouvelles” technologies sont apparues, le changement est devenu le quotidien, avec des outils parfois abandonnés avant même que nous en soyons familiers. C’est ça, à mon sens, qui provoque la défiance.

        Autre point d’achoppement, il me semble, l’utilité de la technologie. Tu vas passer du temps à comprendre le fonctionnement de ton smartphone parce que tu juges en avoir besoin. Tu n’en prendras pas pour une autre technologie si tu ne la juges pas indispensable. Inutile à mon sens pour les technophiles de s’épuiser à former aux geekeries, ce qu’il faudrait, c’est les rendre indispensables (ou se demander nous-mêmes si elles le sont vraiment, pour qu’une majorité n’y adhère pas ? – juste pour t’énerver, la parenthèse ;-)).

        Enfin, je rejoins Aurélie pour ce qui est des formations : à l’IUT j’ai appris, et ce n’est qu’un exemple, à faire des blogs sous blogger. Autant dire qu’aujourd’hui je suis déjà dépassée et je rame pour le CSS, etc, pour lequel je n’ai jamais eu le moindre cours. Il faudrait que je prenne le temps de me former mais il y a le quotidien déjà chargé, les concours, etc. Je le reconnais, c’est moi qui ne prends pas le temps (mais je vais le faire !). En ce sens, je suis déjà devenue une old quiche et nous serons tous old quiches à moment donné, sur certains points 😉

        Dans l’absolu, je suis évidemment pour ce “numérique friendly”, dont je pense qu’il finira par émerger, mais en prenant son temps.

  11. Si les “freak”s sont devenus des “geeks” lorsque la calculatrice et l’ordinateur sont apparus, alors moi je ne veux pas devenir un monstre de foire qui tape sur son claver jusqu’à 3 heures du mat.et qui dit à Twitter et facebook qu’entre les 2 son coeur balance. Encore moins un “fou de carnaval” (Gicque) qui dégaine ses pearltrees et autres Slide-shows durant son side-show!

  12. Je ne sais pas si je vais bien de laisser un com mais j’ai envie de donner mon opinion moi aussi. J’ai 23 ans et je travaille (enfin je suis en CDD) depuis 2 ans 1/2 dans une médiathèque.
    Il y a quelques mois on nous a fait des formations : créer un wiki interne et un site de partages qui n’existe plus et qui m’a tellement marqué que je ne me souviens plus de son nom. Alors là oui on a vu la frontière entre les “fluctuants” et les “off” mais j’ai pas franchement trouvé que les non-initiés freinent des 89 fers pour apprendre.
    Alors non la médiathèque dans laquelle je travaille n’est pas le pays de Candy ni des bisounours mais je crois que, bien que notre équipe soit âgée de 56 à 23 ans, le personnel a pris conscience de la nécessité de s’adapter et de s’approprier ces nouveaux outils numériques. Je suis même assez bluffée de la veille tenue par certains collègues.
    Dans mon équipe, il y a des gens qui ont le CAFB, d’autres des masters, licences, des DUT ou licences pros mais je n’ai jamais ressenti un quelconque ordre établi en fonction du diplôme que l’on a autant de manière positive que négative.
    Je comprends ce qu’a voulu dire sophiebib en disant que c’était réducteur de dire “On se contrefiche d’avoir des catalogueurs ou des spécialistes de Rameau ou des théoriciens des bibliothèques dans nos boutiques, on a besoin de collègues qui (par exemple) …”. Même si je pense que le débat n’est pas là, je pense qu’à l’heure d’aujourd’hui on est tout à fait capable de maîtriser RAMEAU et de mettre à jour le wiki interne tout en suivant son Netvibes et son Zotero ! Et j’en connais plusieurs qui le font à mon travail. Moi j’appelle ça être un couteau suisse et j’ai souvent l’impression d’ajouter de plus en plus de cordes à mon arc ainsi et ça me plaît !
    J’ai fait mon DUT à Lille puis la Roche s/Yon, et en toute honnêteté on ne m’a jamais cité AUCUN site internet comme zotero and co qui sont des outils très pertinents pour le travail de bibliothécaire et j’ai même appris à cataloguer selon la vieille méthode du “point tiret”.
    Je pense donc que le problème et cette pseudo frontière est aussi du à la formation universitaire et pas que professionnelle et qu’il ne faut pas se dire “oui untel il est jeune, il est plus à l’aise avec le numérique” car oui peut être que cette personne lambda aura plus de facilités mais je pense que ce sera plus du à ses recherches personnelles qu’à sa formation.
    Et j’avoue avec le recul que j’aurais aimé apprendre à chercher bêtement aussi sur un bouquin ou des fiches cartonnées car le jour où dans ma médiathèque un homme m’a demandé un livre encore sur une fiche (ultime survivante de l’informatisation), j’ai été incapable de répondre à sa demande et là je me suis trouvée bien conne …

  13. En tout cas, cela ferait un bon sujet de mémoire ou de thèse en sociologie du travail. Cela permettrait peut-être de comprendre les réactions des uns et des autres. Les quelques références bibliographiques sur le sujet sont assez anciennes. Comme si la généralisation de l’informatique, y compris dans l’espace domestique, avait aboli les difficultés…

    Vais p’têt demander un congé formation à mon prochain employeur, moi 😉

  14. Plein accord avec ce que dit Hubert, c’est ce qu’on constate en formation : quand on parle du numérique sous l’angle du projet et du métier de bibliothécaire ça marche très bien je vous assure et on ne distingue pas les pro et les antis. Ce qu’on essaie de faire comprendre au cnfpt (et il l’entend) c’est que tous les publics des bibliothèques n’ont pas les mêmes besoins en matière de numérique. Les directeurs et encadrants ont besoin de savoir faire de la médiation numérique un projet de service et les gens qui acccueillent et acquièrent au quotidien (pour aller vite) ont besoin qu’on leur parle de numérique à partir de leur préoccupation thématique. Autrement dit, pas de formation blog pour tous mais des formations ciblées où le numérique est toujours un moyen et non une fin. Ces frontières d’effacent tout simplemebt si on se donne la peine de les effacer!

  15. Daniel,

    En partant de ta conclusion, ma première réponse est : à ma connaissance, encore aucun de nos collègues n’est né dans ce siècle (enfin j’espère). Nous ne sommes pas des natifs du monde numérique. C’est un fait objectif, pas un jugement de valeur. Nous devons en tenir compte lorsque nous dissertons sur notre capacité collective à travailler dans ce monde.

    Le seul moyen d’y pallier est la formation continue (y compris pour les natifs qui nous succéderons). Ce qui nécessite à la fois :
    – des formations adaptées (toutes ne le sont pas),
    – la possibilité concrète d’en profiter (organisation du travail des équipes, budgets)
    – la motivation
    Au passage, le suivi des blogs pro / fils twitter peut aider (en tout cas moi, ça m’aide). Mais il faut pouvoir y consacrer du temps (de travail).

    Enfin et surtout, il faut décider si tu veux convaincre ou bien contraindre tes collègues.

    Pour briser des barrières, tu peux briser ceux qui les érigent. C’est ce qui se fait la plupart du temps sur le mode “c’est moi qui ais raison alors juste fais-le”. Ca fonctionne à court terme (menace, poids de l’autorité) mais en général, les mêmes personnes vont élever les mêmes barrières un peu plus loin et plus solides cette fois.

    Donc il me semble qu’il vaut mieux essayer de convaincre tes collègues. C’est long et incertain mais je ne vois pas d’autre solution durable. Il faut montrer l’exemple en se formant soi-même et proposer de former les autres ou du moins les encourager (pas les mettre en demeure de). Et il faut aussi accepter qu’ils le refusent : d’abord, tu seras moins frustré et ennervé et ensuite, de toute façon, on ne réalise pas correctement un travail intellectuel (apprendre) sans motivation personnelle.

    Il faut aussi donner confiance. Il faut aussi absolument démythifier tout le travail autour de l’informatique. Beaucoup de collègues se complaisent dans l’image de gourou techno que les collègues leur attribuent : ça satisfait l’ego des uns et ça dédouanne les autres d’essayer de s’y mettre (« c’est trop compliqué »).

    PS : je confirme, un stylo, c’est bien un objet oblong qui sert à touiller le café

  16. Discussion intéressante, même si on revient souvent à la querelle des anciens et des modernes.
    Je suis d’accord avec pleins de trucs déjà dits par pleins d’intervenants, comme toujours.
    Il y a tout de même des points de détails sur lesquels je voudrais insister :

    – Notre système scolaire, et notre société en général, classe les gens entre scientifiques et littéraires. Les scientifiques n’ont pas besoin de savoir écrire, et les littéraires de savoir compter. Plus grave, on accepte l’idée que quelqu’un “n’ait pas l’esprit scientifique”, et on arrive très tôt à l’en convaincre. Ça crée juste des complexés. Après, on peut multiplier les catégories, mais on se retrouve toujours avec des gens qui disent “oh tu sais, moi, l’informatique, j’y comprend rien”, comme d’autres diraient “la Princesse de Clèves ça sert à rien”. Mais un complexe, ça n’est ni fainéantise, ni mauvaise volonté, et ça ne se dépasse pas de la même manière.

    – Si je découvre un outil super, vraiment utile, qui me permet d’être beaucoup plus rapide et d’éviter de nombreuses erreurs, avant de former les autres à l’utiliser, il me faudra déjà essayer de les convaincre de ses avantages. On passe souvent très vite sur cette étape. Si mes collègues ne sont pas convaincus, il est légitime de remettre aussi en cause la qualité de la présentation de l’outil, et même parfois l’universalité des avantages qu’il procure. Le fait que mes collègues aient pu faire leur boulot pendant des années en s’en passant relativise son caractère indispensable. Oublier ça peut leur laisser penser que je considère qu’il faisaient mal leur travail jusqu’ici, ce qui ne présage rien de bon quant à leur écoute bienveillante de ma présentation.

    – La curiosité prend du temps, et celui-ci n’est pas élastique. Pendant que je m’intéresse aux gadgets informatiques, mon collègues découvre des petits éditeurs méconnus, des revues critiques brillantes… C’est l’aspect collaboratif de notre métier qu’il faut privilégier, pour profiter du fruit de la curiosité et du travail de chacun. On n’avance pas sur le web sémantique, sur les FRBR, sans profiter de l’expérience (en constante évolution) des spécialistes de Rameau et du catalogage.

    – Les freins à l’utilisation d’outils informatiques complexes NE SONT PAS des problèmes de personnes. On peut se débarrasser du problème de l’age avec quelques exemples de jeunes technophobes et de vieux geeks, mais même là, soit on semble trouver les “exceptions qui confirment la règle”, soit on transfère la frontière entre les gens modernes par essence, et les ringards de naissance. Ce clivage est infondé. Les catalogueurs de BU bossent sur WinIBW, l’un des outils informatiques les moins intuitifs que je connaisse. Même ceux qui maîtrisent mal le copier-coller. Ça n’est donc pas une question de complexité, ni d’abstraction.

    Sinon, je saurais probablement changer une cartouche de stylo, mais certainement pas réparer un serveur mail. J’en connais qui se vexeraient de la comparaison. En même temps, je tape avec deux doigts, donc j’utilise encore de temps en temps un stylo pour écrire, je suis donc pas objectif (je ne touille pas mon café, je le prends sans sucre).

  17. Puisque c’est une question politique : combien de directeurs de bibliothèques donnent comme consigne de valoriser le temps passé à l’autoformation ? Sur les fiches de postes, où celle-ci apparaît-elle ? Dans l’évaluation du temps de travail hebdomadaire, est-elle jamais quantifiée (et donc justifiée) ?
    Au mieux, on l’estimera peut-être légitime chez un A, mais un responsable de bibliothèque dira-t-il explicitement à ses magasiniers : “Vous avez le droit et vous devez passer du temps à vous autoformer”, en donnant une quantification et des moyens de commencer cette démarche ?

  18. @lully, je suis magasinier, je me suis autoformée (faut pas oublier que le mag passe de longues heures en banque de prêt à attendre le chaland, ce qui nous laisse du temps pour l’autoformation) et mon directeur a vite compris l’intérêt qu’il pouvait y trouver, je suis l’interface bib au sein de l’équipe informatique…….on parle pas toujours la même langue mais on avance et c’est le principal.
    J’aide mes collègues et les lecteurs pour tous types de pb informatique. Ce que je constate, ce n’est pas un pb de vieux ou jeune, il faut simplement être un peu curieux et y mettre un minimum de bonne volonté. J’explique toujours ce que je fais (un utilisateur averti est un utilisateur qui ne te dérangera plus), je reste patiente et je mets à l’aise par rapport à l’outil…..c’est pas une bête machine qui va faire sa loi, elle a juste le droit de t’obéir, à toi à lui donner à manger correctement…. et si tu la casses et bien on la réparera…
    J’ai commencé ma carrière en BU en 1993 avec mobibop !! Je trouve que les personnels de bib ont fait de très gros efforts pour intégrer l’outil informatique, surtout qu’au début il n’y avait pas d’informaticien dans nos boutiques….et que finalement on s’en est sorti plus qu’honorablement mais c’était une question de survie…

  19. M’est avis que comme le dit à un moment Daniel, il s’agit principalement d’une question de débrouillardise, et de désinhibition à l’idée de “faire une bêtise”.
    Nous avons été élevés dans une culture de peur de l’erreur qui fait que pleins de gens avec qui je travaille ne toucheront pas au photocopieur ou encore moins à une machine à 1000 € d’un étudiant de peur de mal faire, et que même s’ils savaient ils ne souhaitent pas en prendre la responsabilité.
    De là, la tentation de plutôt faire appel à l’expert, qui dans nos métiers (par exemple moi avec les photocopieur) n’est que quelqu’un qui ose ouvrir le ventre des machines ou prendre dans la trousse de premier secours une pince à écharde pour extraite une cartes coincée ou une feuille en miettes.

    Plus que de l’autoformation, plus que des stages informatiques, peut être du visionnage intense de Mac Gyver, accompagné du “faire avec” et du “laisser faire” pourraient aussi participer à l’extension du nombre de ceux disposés à se dire “moi aussi, je peux le faire”.

  20. La question de génération native ou pas, de l’âge, du geek ou pas geek n’est pas le coeur du problème à mon sens.
    Je suis tout à fait d’accord avec le principe de la débrouillabilité mais encore faudrait-il qu’il soit … comment dire … inné et autorisé (dans l’ordre qu’on veut).
    On voit encore trop souvent de “Attention, fais pas ça, on sait pas ce que ça va faire” …
    faut essayer, se planter, réessayer, encore se planter avant de réussir et là est le concept qui n’est pas intégré.

    Sur le sujet du numérique, je voulais aussi relever l’inadéquation des formations initiales en bib. avec les enjeux du numérique, et particulièrement du numérique en bib.
    je sors de formation licence pro et suis en contact avec des formés et des apprenants licence, master, DUT, Deust, etc. des métiers du livre et le constat est général : l’autoformation commence dès la formation initiale. Et le problème est là.
    En cours d’informatique, on apprend à utiliser Excel et Access … où sont les outils aussi bien professionnels que particuliers ?
    Et à mon sens, quelque soit la génération, tant que les habitudes et les pratiques n’auront pas intégrées que le numérique est présent et imposant, on ne fera que stagner …

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