T'as ton kit ?

closeUne année au moins est passée depuis la publication de ce billet qui peut donc contenir des informations un peu datées.

Quelque chose m’a frappé au Salon du Livre : beaucoup des personnes avec lesquelles j’ai échangé sur le livrel avaient sous le bras journaux et/ou livres, et certains m’ont parlé fort intelligemment du numérique avec tout ça (livres et journaux papier) dans la main (et dans la tête, je crois).

A chaque fois, les discours partaient du livre papier pour analyser le numérique, et je me suis dit qu’on ne pouvait pas appréhender le numérique depuis le livre ; et que c’était peut-être pour cela qu’il y avait ce décalage grandissant (enfin, c’est mon ressenti) entre un discours et des positions “traditionnelles” autour de la question, et les pratiques quotidiennes que je vois autour de moi.

En fait, je pense que l’on ne peut quasiment pas penser le numérique et ce qu’il change, à partir du modèle du livre physique. Pas encore. La rupture est tellement violente que les cadres anciens de réflexion sont pour partie inadéquats, et qu’ils ne servent à rien, au mieux ; contribuent à sous-estimer la valeur des nouveaux contenus produits, au pire (au sens où le modèle du roman, par exemple, ne peut peut-être pas aider à apprécier et jauger ce qui se fait dans les blogs où se crée sans doute une littérature nouvelle ; et que si l’on utilise Proust comme seul référence qualitative, on risque de ne pas comprendre cette nouvelle littérature – en même temps, le Marcel, je pense que ça l’aurait fasciné, cette possibilité d’extension infinie du texte que permet un blog de création littéraire, lui qui devait bien s’amuser à coller partout dans ses manuscrits ses petits bouts de papier qui lui servaient de MàJ avant l’heure).

Enfin, tout ça pour dire que moi, en face des lettrés et de leur kit de lettré, j’étais comme une nouille avec mon sac à dos qui ne contenait que mon netbook et mon livrel. Je ne devais pas faire très intelligent. En même temps…

PS : bien entendu, mon netbook, mon livrel, participent de mon propre kit de “jeune branché numérique” (enfin, jeune, faut le dire vite) : on est toujours le kit de quelqu’un…

PS2 : non mais vous imaginez, Proust avec un outil comme un blog ? Vous imaginez ?…

15 thoughts on “T'as ton kit ?

  1. complètement d’accord avec toi, et ça a été aussi surprise au Canada (jamais vu d’utilisateur de Sony, dans 4 facs où j’ai fait confs sur numérique & littérature, l’iPhone grosse percée a-t-il déjà tout mangé?) : or, pas possible de “réfléchir” sans “toucher”, donc formater, piger les ergonomies, la notion même de bibliothèque – je suis certainement pas si bon que toi dans le profil “jeune branché”, mais ma valoche numérique c’est avec ça que je me déplace…

  2. Intéressante réflexion ! Il est vrai que je ne voyais (plus depuis la lecture de ce post) le livrel que à travers le livre physique. Je garde ton post en tête et tâcherai de rebondir..

  3. @F : intéressant : c’est la main qui nous aide à comprendre l’immatériel…
    @Jeanne : oui, je crois qu’il faut essayer d’abandonner le “modèle” livre pour essayer d’appréhender le numérique… Abandonnons… Ou mettons entre parenthèses, le temps de….

  4. Longtemps, je me suis loggué de bonne heure. Parfois, à peine mon eeepc allumé, mes commentaires s’ouvraient si vite que je n’avais pas le temps de me dire : « Je trolle. »

  5. Il faudra du temps : on a fêté les vingt ans du web, et il a fallu tout ça pour déconstruire le texte linéaire et arriver à Twitter et aux cartes heuristiques.
    Donc les perspectives du livrel… Deux ans minimum pour arriver à cesser de concevoir les deux supports en parallèle.
    Et cinq ans pour que le livre papier soit rénové par les pratiques du livrel.
    Dans six ans, il n’y aura plus de différence entre livrel et livre papier : un peu comme il n’y a plus de différence entre des sites web 1.0 et des sites web 2.0 (ou presque) — avec des empiètements progressifs de part et d’autres

  6. @B&C : Marcel, on t’a reconnu, tombe le masque ! Et pose cette madeleine, tu fous des miettes sur ton clavier !

    @Lully : entre nous (mais je compte sur ta discrétion) j’ai peur que ce soit plus long…

  7. Contente de voir que tu n’as pas mis fin au blog….et flattée d’avoir participé à ta thérapie jeudi matin….

  8. @karine : je n’ai pas ENCORE mis fin au blog… Pour la thérapie, j’espère que mon intervention n’a pas été trop ennuyeuse, j’ai eu l’impression terrible d’être incompréhensible. Bon, je ferai mieux la prochaine fois.

  9. “En fait, je pense que l’on ne peut quasiment pas penser le numérique et ce qu’il change, à partir du modèle du livre physique”
    400% d’accord…

  10. @dbourrion : techniquement, tout devrait être prêt à ces échéances. Et pour l’adaptabilité des utilisateurs, je crois que nous ne sommes pas capables d’apprécier correctement ce que seront les jeunes qui ont 10-16 ans aujourd’hui.
    Il est tout à fait possible/probable que la progression des usages arrive par le jeu (genre “le livrel dont vous êtes le héros”)

  11. @dbourrion : Merci pour ton intervention, (claire et pas ennuyeuse…), en attendant la prochaine avec plaisir…

  12. @Karine : je suis hermétique à la flatterie 😉 Pour la prochaine…. C’est un peu loin, Chambéry…

    @Lully : je me suis mal exprimé, j’ai lu ton commentaire trop vite : en fait, je parlais du livrel dans les bibliothèques… Pour les usages et les utilisateurs, je ne m’inquiète pas, ça va aller vite 🙂

  13. Dans son article sur le texte numérique (Esprit de ce mois-ci), Françoise Benhamou écrit qu’on ne peut pas penser le livre numérique en transposant les modèles du papier. D’une part parce que le numérique crée une interactivité importante entre l’auteur et son lecteur et d’autre part à cause des nouveaux modèles économiques qui se mettent en place (abonnements, bonus, etc.).
    C’est elle qu’il aurait fallu inviter au salon 🙂

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