Chez Casto y'a tout ce qu'il faut

closeUne année au moins est passée depuis la publication de ce billet qui peut donc contenir des informations un peu datées.

A chaque fois que je participe à une réunion de travail hors SCD, qui me fait rencontrer mes homologues remplissant, peu ou prou, les mêmes fonctions que moi, quelque chose me frappe : nous sommes des bricoleurs (et j’en suis un aussi – aucun jugement, juste un constat, et en rappelant la grande noblesse du bricoleur qui à partir de rien vous monte un monument), et la plupart, si ce n’est la grosse majorité, d’entre nous, n’a pas de réelle formation en informatique.

Qu’est-ce à dire ?

  • Que des fonctions comme la mienne, où des sommes de plus en plus considérables sont en jeu, sont assumées par de courageuses personnes, certes, mais qui n’ont pas nécessairement au départ le background technique que supposent, à mon avis, lesdites fonctions.
  • Que des outils de plus en plus pointus sont gérés par de courageuses personnes dont on sait que, du fait du recrutement en bibliothèques, quasi toutes sont de formation littéraire, bien éloignée de la technique justement (si je prends mon seul exemple, quel rapport entre ma fonction de responsable de bibliothèque numérique, mes petites bidouilles, et mon DEA de littérature comparée ?)
  • Qu’il nous est demandé de faire des choix stratégiques d’importance ; de faire fonctionner et évoluer des outils, souvent, les mains dans le cambouis ; de travailler avec de vrais techniciens ; alors que clairement, nous ne sommes pas des spécialistes.
  • Que vu la place du numérique en bibliothèque, ça ne va pas s’arranger.

J’avoue que personnellement, ça me pose un problème. Parce que j’ai vu plus d’une fois que quelque chose qui pouvait me coincer plusieurs heures était réglé en quelques minutes par un développeur, par exemple. Parce que, plus généralement, il m’arrive souvent de sentir que je touche à mes limites sans être allé bien loin. Et parce qu’enfin, je me demande souvent dans quelle mesure mes faiblesses techniques constituent des freins à l’ancrage de ma bibliothèque dans le présent, et à sa préparation de l’avenir .

La question là est donc : un bibliothécaire, un conservateur, est-il la personne la plus qualifiée pour s’occuper d’informatique documentaire ? Si oui, alors qu’attendons-nous pour former des bibliothécaires systèmes (je ne parle pas de l’intitulé de la fonction, je parle de profils et de formations spécifiques). Si non, qui, alors, devrait s’occuper de ça ?…

PS : oui, je scie peut-être la branche sur laquelle je suis assis. Mais je me place ici du point de vue de l’arbre.

PS2 : et en rappelant que la question des tailles des équipes bibnum reste posée.

15 thoughts on “Chez Casto y'a tout ce qu'il faut

  1. C’est une question qui revient régulièrement sur les blogs, non ? Pour la réforme du concours de conservateur, pour les compétences demandées dans le métiers, etc.

    De manière pragmatique, je dirais : si y’a pas moyen de recruter directement, par voie de concours, des personnes qualifiées en informatique (et encore, là, je sens que le terme “informaticien” est hyper vaste, et qu’il demanderait en fait à être affiné. On a besoin de quelles compétences, en bibnum ? Tu pourrais développer ?), on peut:

    1. recruter des gens autrement que par concours. Des ingénieurs, par exemples.
    2. Former des gens qui ont un cursus littéraire, par exemple, à ces tâches spécifiques. Quand je dis “former”, c’est pas trois-quatre jours par-ci par-là, c’est au moins 6 mois. La formation de conservateur à l’Enssib dure 1 an et demi. Au bout d’un an et quelques stages, je pense qu’on a compris ce qui nous intéressait. Et un littéraire est tout à fait capable (tu en es la preuve vivante, et dans mon établissement, nous avons un autre spécimen :-)) d’apprendre de l’informatique.

    Une formation généraliste en sciences humaines et sociales n’empêche pas, après coup, d’acquérir des compétences, même pointues, dans des domaines scientifiques “durs”. Pourvu qu’on en ait l’envie. Et que les moyens suivent.

    3. Changer les modalités de concours. Là, cela reste très hypothétique, je n’y crois pas.

    Les points 1 (surtout) et 2 (peut-être) sont les plus probables (j’allais écrire: prometteur). Surtout le 1, en fait, parce que le 2 coûte des sous, et vu le contexte actuel, nanana, on peut pas tout faire: renflouer des banques et développer le service public de la recherche, hein. (Oups, désolé, ça m’a échappé).

    Mais de nombreuses SS2I forment des étudiants qui sortent de master ou d’école d’ingénieur pendant plusieurs mois. C’est le cas d’Unilog, par exemple. Faut-il avoir une formation scientifique avant ? C’est un plus, bien sûr. Mais ce n’est pas un prérequis obligatoire. Simplement, en terme de formation, cela sous-entend que l’on dépasse une logique de… bricolage.

  2. Clairement NON, le bibliothécaire n’est pas le mieux placer pour parler d’infodoc. En tous cas, pas tous les bibliothécaires, et surtout pas tout seul.
    Premièrement, ce métier a besoin de spécialisation. Un acquéreur en latin, un chargé de bib num, et un responsable de la formation ne font pas tout à fait le même métier, même si on a le même cœur de métier. Pour construire une maison, il faut un maçon, un plombier, un électricien…et on ne va pas faire faire la charpente par le plombier. Quand on voit nos portails, nos espaces multimédia, parfois, c’est quand même un peu ça. A force de faire un peu de tout bien, on fait un peu tout mal. Ça n’empêche pas d’avoir des profils différents étalés sur une carrière et c’est justement une des richesses de ce métier. Le recrutement ET la formation devraient prendre en compte cette spécialisation
    Deuxièmement, le bib, même formé et compétent en la matière sera toujours un peu tout nu sans son informaticien. J’en fais l’amère expérience en ce moment, voir mon billet à ce sujet, même si de toutes façons, le bib ne sera jamais un informaticien et puis c’est pas ce qu’on lui demande. Pour qu’un bib et un informaticien puissent se comprendre, il faut avoir des informaticiens DANS les bibliothèques, sensibilisés à nos outils, normes et problématiques.

  3. Il existe désormais un parcours informatique/information (Ingénierie de l’information) en licence à l’université de Rouen. Impossible de linker vers le programme, le lien fourni par la fac ne fonctionne pas 🙁 Faute de mieux, il y a la petite bafouille que j’avais écrite sur le sujet chez Territorial : http://www.territorial.fr/PAR_TPL_IDENTIFIANT/31619/TPL_CODE/TPL_ACTURES_FICHE/PAG_TITLE/Enfin+une+vraie+double+comp%E9tence+%3F/302-actu.htm
    Et le lien vers la page du Département informatique de l’univ : http://www.univ-rouen.fr/DPI/0/fiche_UFS__structure/
    Pour une fois, la problématique est prise “à l’envers”, c’est-à-dire que ce sont des profils scientifiques/informatiques qui vont se former à la gestion de l’information. La licence dépend en effet de l’UFR sciences et techniques, département informatique.
    La licence a débuté cette année et normalement devrait déboucher sur un master. Bref, ça y est, la formation des bibliothécaires système est sans doute en train de commencer !

  4. Ca m’a posé problème jusqu’à ce que j’arrive à établir de bons contacts avec les gens des CRI : même un bibsys ne peut pas s’en sortir tout seul, mais sa grande chance est de pouvoir communiquer avec les gens du service informatique. Et à partir de là on peut vraiment avancer.

  5. @MxSz : donc (si j’ai bien lu ton point 2) : former des spécialistes à la sortie de l’ENSSIB ?… Euh, est-ce qu’on ne pourrait pas faire plutôt des profils dès l’entrée et gagner du temps. Pour ce qui me concerne, je savais dès l’entrée que j’étais plus attiré par les machines que par les vieux bouquins…

    @davidolib : je crois que nous sommes d’accord…

    @Aurelie : certes, en territorial. Mais en Etat ?…

    @marlène : trucs welcome… 😉

  6. nan, nan, je disais pendant l’Enssib (pour les cons’ en tout cas, mais en fait, pour les bib, je pense que ça serait réalisable aussi).
    Après, pour celles et ceux qui ont déjà quitté l’enssib (et le resto administratif de la Doua), en formation continue longue. Enfin, je dis ça…

  7. Je me répète mais l’emploi de “Chargé de système d’information documentaire” (grade d’ingénieur d’étude) existe déjà dans la famille A* de la BAP F** de la filière ITRF***

    * Information scientifique et technique, collections patrimoniales
    **branche d’activité professionnelle – Information : documentation, culture, communication, édition, TICE
    *** Ingénieurs et Techniciens de Recherche et Formation

  8. @antmeyl : alors où sont-ils, ces chargés de SID ITRF, dans les bibs ? Je n’en vois pas. Et est-ce à dire que tu penses (pour répondre à mon interrogation) qu’ils seraient bien plus appropriés dans ces emplois de conservateurs bibnum que les conservateurs ?

  9. @dbo : tes questions appellent plusieurs réponses.

    Pour la question 1 : c’est un emploi de création récente : 1 an ou 2. Pour les voir dans nos BU, il faut attendre :
    1. des emplois correspondants qui soient vacants ou créés
    2. que l’employeur décide de recruter un personnel de la filière ITRF à la place d’un personnel de la filière Bibliothèques pour occuper cet emploi
    3. qu’il y ait des candidats correspondants au profil et là, nous pouvons constater, à la lecture du post d’Aurélie, que les formations adéquates émergent.

    Pour la question 2, je ne pense pas qu’un remplace l’autre. Ils sont complémentaires. La bibnum ne peut pas reposer sur 1 personne. Plusieurs postes complémentaires sont donc à pourvoir.

    Le responsable de la bibnum doit être un bibliothécaire au sens large car c’est un objet bibliothéconomique avant d’être un dispositif technique (pour faire court, ça reste une bibliothèque).

    Par contre, pour mener à bien un projet qui doit évoluer en permanence ce qui nécessite de surmonter des contraintes techniques elles-même en évolution il doit pouvoir s’appuyer sur un ingénieur en informatique documentaire : plus qu’un simple technicien capable de faire fonctionner la Bête, qq’1 qui peut faire évoluer techniquement la machinerie qui fait tourner la bibnum.

  10. @dbo : Ce n’est pas que pour la territoriale, je faisais juste allusion au site/éditeur chez qui j’ai publié la petite brève d’info 😉
    Il s’agit bien d’une formation tout ce qu’il y a de plus ouvert sur le privé comme sur le public. Maintenant j’ai hâte de voir ce que cela va donner en termes d’insertion sur le marché du travail et aussi de quoi va être fait le Master prévu à l’issue de cette première expérience en L3. Je vais essayer d’aller à la pêche aux infos sur ce sujet.

  11. @antmeyl et @ Aurélie : vos réponses croisent ce que je voulais dire : quelle place dans les Bu pour ces nouveaux personnels (pas du point de vue fonctionnel, nous sommes bien d’accord, il nous en faut – mais au niveau du recrutement… Qui va oser ?? 😉 )

  12. L’outil informatique devenant de plus en plus un machin familier — contrairement aux logiques bibliothéconomiques qui sont une certaine déformation de regard sur le monde — je préfère espérer que les prochains sortants de l’Enssib s’adapteront plus facilement aux exigences minimales de développement web et de manipulations de données, que des informaticiens (j’entends par là “développeurs”, càd non des utilisateurs de l’outil, mais des programmeurs capables de saisir des lignes de code) ne seront capables d’intégrer une certaine vision de nos missions.
    Pour ma part, j’ai noté ce que qui était le plus difficile, c’était de définir des besoins, de rester collé aux services attendus par nos usagers, tout en demeurant à l’affût des nouveautés techniques et en étant capable de dialoguer avec des développeurs, pour :

    1. comprendre ce qu’ils disent et se faire comprendre d’eux
    2. savoir ce qui est possible et ce qui ne l’est pas
    3. distinguer dans les innovations techniques quasi-quotidiennes celles qui correspondent à un réel service, celles qui vont devenir un standard, voire une obligation, et celles qui ne vont pas durer ou qui pour nous ne serait que des paillettes.

    Ca veut dire concrètement :
    1. arrêter de croire que “l’informatique, c’est l’avenir” (c’est déjà le présent, c’est même le passé, et c’est surtout notre pain quotidien !)
    2. connaître le HTML. Franchement il y a peu de langages plus simples (notamment parce que le résultat est immédiatement visible)
    3. ne pas avoir laissé passer le RSS il y a deux ans, et ne pas laisser passer les COinS maintenant si on est en train de signer un marché.
    4. ne pas dire “on veut du web 2.0” mais : “nous devons fournir tel et tel service à nos usagers, nous devons correspondre à leurs comportements sur le web”.
    4. être un utilisateur forcené des outils de base.
    Ces outils de base, c’est pour commencer les outils de bureautique (Word, Excel), parce qu’avec eux on peut déjà considérablement manipuler les données (tableaux croisés, publipostage, exports XML, etc.).

    Les “informaticiens”, ceux dont nous rêvons, n’ont pas eu une formation poussée à Word et Excel et autres utilitaires. Ils ont appris à créer les logiciels, pas à s’en servir. Ils ne voient pas les usages qu’on en attend (en tout cas leur formation ne les y incite pas). Ils savent saisir sous Notepad du Perl, du Java, du Python ou autres, et ils se promènent d’une branche à l’autre avec leurs compétences (commerce, tourisme, culture, industrie, administration, etc.).
    Et c’est dans chaque branche qu’ils doivent trouver des interlocuteurs.

    Pour moi, le “bidouillage” est encore la meilleure solution, parce que le bidouilleur a un usage poussé de l’informatique qui découle de son utilisation des ordinateurs. Et malheureusement il n’y a pas mieux.
    Effectivement, ça implique une formation tout de même. A mon avis, plutôt une formation continue, adaptée aux besoins du moment : parce qu’en informatique, si on apprend un truc sans l’appliquer aussitôt, on l’oublie très vite.
    Le métier d’informaticien est d’ailleurs une profession ou l’auto-formation est un principe de base, et une réalité ininterrompue. Ca doit donc l’être aussi pour les bibliothécaires systèmes. Mais les compétences de ces derniers sont “condamnées” à être ancrés dans leurs besoins immédiats : code PHP, XSL ou autre selon les applications de la bibliothèque où ils atterrissent.

    Je crois que je vais m’arrêter là pour le moment…

  13. @Lully : pas mal, quand même, ton argumentaire. Tu parviendrais presque à me réconcilier avec le bricoleur qu’il y a dedans moi..

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