Siffler en travaillant

closeUne année au moins est passée depuis la publication de ce billet qui peut donc contenir des informations un peu datées.

(Pour rebondir sur ce billet et approfondir le commentaire déposé là-bas)

Lors des formations individuelles que nous donnons dans le cadre des prêts longs de portables, j’ai constaté que même les étudiants avancés n’ont pas la moindre idée de ce qu’est un aggrégateur, un flux RSS. A chaque fois que j’ai proposé d’explorer ces “choses”, j’ai eu droit à des regards effrayés du genre “mince, un psychopathe…” ; ou à un vague assentiment, type “mouais, encore un truc de bibliothécaireç ça va être relou…”. Et à chaque fois aussi, après la découverte, mes interlocuteurs étaient ravis par la simplicité du truc, et par sa puissance dans une optique de veille efficace (quelle que soit cette veille).

Depuis, je me demande si la bibliothèque n’a pas une carte à jouer comme prestataire de formations pour ces outils qui permettent accessoirement d’entrer dans des choses plus lourdes du genre “Les bases de données, merveilles et mystères….”, mais qui sont aussi, surtout, d’abord, des outils dont l’usager éclairé (lisez, le citoyen et/ou le professionnel – dans nombre de métiers) a ou aura besoin de plus en plus du fait de l’importance grandissante du web.

Ainsi, plutôt que de commencer par nos outils les plus rébarbatifs et les plus spécialisés, pourquoi ne pas attaquer d’abord par “Travailler moins : les flux RSS” ; “Se marrer sérieusement : les blogs”. Et plutôt que tenter de vendre nos formations chiantes complexes à nos collègues enseignants, pourquoi ne partir d’outils extérieurs que l’on peut (aussi mais pas forcément) utiliser en bibliothèque, au lieu d’ennuyer tout le monde avec notre formation “OPAC de noël à pâques” ? Initier à des outils plutôt qu’à nos outils ?

PS : Remarquons au passage que le fait que nous ayons besoin de former à notre OPAC signe l’échec de l’OPAC : Google ne demande aucune formation et tout le monde s’en sert.

PS 2 : bon, je ne sais pas, c’est une idée comme ça… Je ne suis pas un spécialiste en formation. Vous me direz…

0 thoughts on “Siffler en travaillant

  1. Ton PS 1, c’est de la mauvaise foi et/ou de la provocation.
    Nous formons à l’utilisation de l’Opac parce que c’est notre outil. Et on peut tout aussi bien former à Google (d’ailleurs, à Paris 6, on le fait, mais le nombre d’heures de formation disponibles…).
    Et il y a des outils que les étudiants trouvent très bien, tout en admettant qu’il leur faudrait une formation (Pubmed, pour commencer).

  2. @Lully : les deux mon capitaine. Mais tout de même (et en parlant du volume d’heure disponible qui limite et conduit à faire des choix…) : pourquoi former d’abord à l’OPAC – un outil souvent pas terrible ? Pourquoi ne pas faire des OPAC plus abordables ?
    Et c’est en fait la question que je pose : pourquoi perdre autant d’énergie à former d’abord à nos outils pas terribles ? Pourquoi ne pas former d’abord aux outils plus performants/abordables, qui permettraient éventuellement d’utiliser les nôtres et/ou nos fonds (pour peu que nous les “poussions” dans ces outils sexys) ?

  3. @dbo : on forme à l’OPAC parce que c’est utile et parce que si on ne le fait pas, qui le fera?

    C’est l’OPAC n’est pas utile, la question n’est pas “pourquoi nous formons à son utilisation” mais pourquoi il existe?

    “Pourquoi ne pas faire des OPAC plus abordables ?” Faciliter l’accès à nos ressources, c’est bien ce que nous sommes sensés faire. Le problème n’est pas de le vouloir (“Pourquoi ne pas…?”) mais bien d’y arriver (“… faire des OPAC plus abordables”).

    “Pourquoi ne pas former d’abord aux outils plus performants/abordables” Même remarque : encore faut-il trouver ces outils. OK pour le fil rss et les agrégateurs et tout un tas de logiciels bien utiles. Mais pour l’OPAC, on utiliserait quoi?

    Je comprends bien la démarche qui consisterait à rendre accessible nos ressources à partir des outils sociaux utilisés couramment par nos usagers plutôt que de les former à nos outils d’accès qui n’invitent pas vraiment à la sociabilité.

    Reste “juste” à trouver les ressources nécessaires à mettre en oeuvre cette démarche.

  4. @antmeyl : il me semble évident que nous devons former les usagers aux outils qu’ils utilisent en permanence, si ces outils peuvent avoir un angle d’attaque documentaire :
    — Google (et iGoogle), Wikipedia (pas seulement “Attention, tout n’est pas vrai”, mais aussi toutes les fonctionnalités de navigation et de rebond, etc.), les blogs, les podcasts, Netvibes
    — utiliser Dailymotion et Youtube pour trouver des tutoriels
    — utiliser Google Book Search pour faire une recherche en texte intégral sur de nombreux livres qu’ils pourront ensuite trouver en bibliothèque
    — mieux utiliser Firefox (cf. par ex. ce billet)
    — etc. etc.

  5. @antmeyl : “Mais pour l’OPAC, on utiliserait quoi?” rien : on pousse nos SIGB vers les moteurs de recherche (des pistes )… (oui, c’est de la provoc mais juste un peu)
    Et sur “Reste “juste” à trouver les ressources nécessaires à mettre en oeuvre cette démarche.” : ben cessons de faire des choses inutiles par ailleurs 😉 ça nous donnera des marges de manoeuvre

    @ Lully : voilà, c’est ça : Partir d’un outil extérieur et trouver l’angle d’attaque documentaire. Passer d’une logique centrifuge (les outils de la bib. comme centre dont on s’éloigne) à une logique centripète (les outils extérieurs s’ils ramènent à nous)…

    PS : j’aime bien quand ça discute entre commentateurs dans mes commentaires, ça fait salon convivial, n’hésitez pas 🙂

  6. Il y a aussi une volonté forte des tutelles et des collègues de “valoriser” (sous la forme de formations, notamment) des ressources qui ont coûté fort chères.

    Un opac, cela représente (hélas) souvent plusieurs années de travail, un entretien quotidien: difficile d’annoncer aux collègues qui s’en occupent que bon, finalement, vot’ truc, là, c’est bien mais bon, z’avez pas vu Google, non ? Ce que je veux dire – tout en partageant, sur le fond, ta vision des choses concernant les portails – c’est que nous allons vivre encore quelques années avec.

    Concernant plus précisément ta proposition (former aux outils du web 2.0 d’abord), cela me pose trois questions.
    1. mon expérience de formateur, cette année, au contact d’un public de L1 (60 pèlerins durant 12 heures), est la suivante: la plupart de ces étudiant ne consulte pas internet assez régulièrement pour ressentir la nécessité des outils de veille, quels qu’ils soient. A leur niveau, cela vient trop tôt; ils en ressentiront le besoin au mieux dans quelques mois, sinon quelques années.
    2. Pour l’instant -pour l’instant seulement – je ne vois guère le rapport entre les outils web 2.0 et les outils que nous proposons en bib (catalogue + BDD, en gros). Les deux formations me semblent donc complémentaires, jusqu’à ce que, dans un avenir proche ou lointain, les bibliothèques se soient appropriées petit à petit les fonctionnalités du oueb 2 ou 3.0
    3. En formation, découpler le catalogue d’une séance pratique en BU ne me semble pas une bonne idée – sauf si cela porte sur les ressources électroniques, bien sûr. Se promener dans les rayons, rapporter un certain nombre de documents au formateurs, chercher dans le catalogue, rédiger une bibliographie: tout cela doit être fait en un seul et même mouvement.

  7. @ MsSz : ah ben je m’inquiétais, plus de comments de ta part, je craignais pour ta santé 😉

    Bref : merci pour les remarques 1, 2 et 3 (je ne reviens vite que sur le 2. : des outils 2.0 bien fait peuvent résoudre la coupure entre outils 2.0 et nos outils en remplaçant ces derniers… Enfin, peut-être…)

    Par contre, je rebondis sur toute la première partie : oui, effectivement, il y a ce problème de faire son deuil d’outils qui ont coûtés cher. Et je crois que c’est un vrai et gros problème en bibs : nous ne savons pas fermer les portes. Alors nous continuons à utiliser des outils qui marchent mal au seul prétexte qu’ils nous ont coûtés sang et eau, argent et sueur… Il nous faut une psychanalyse collective pour apprendre à arrêter quand même un truc qui ne marche pas, même s’il nous a coûté la peau des fesses. Il faut arrêter de creuser nos propres tombes avec nos propres dents.

    Autre possibilité (non exclusive de ce qui précède) : arrêter autant que possible de monter des usines à gaz super coûteuses… Du genre euh… Serveur OAI local pour ne pas utiliser HAL, par exemple…

  8. … surtout qu’il est possible d’habiller HAL avec la charte graphique de l’établissement dans lequel on travaille… C’est ce sur quoi bossent mes excellentes collègues en ce moment. Et comme ça, tout le monde est content.

  9. @dbo : je savais bien qu’il fallait te pousser un peu pour sortir du bois et lacher LE nom 😉
    Et dans ce cas-là, nous entrons dans LE débat : être enGooglé (Scroogled) ou ne pas être?

    @Lully : merci pour cette utile référence, néanmoins nous devons reconnaître que ces outils font encore très souvent figure de gadget. En SJP par exemple face aux Dalloz, Lextenso, Lamyline ou LexisNexis : j’imagine la tête d’un étudiant en droit si je lui conseille Google Book Search, Dailymotion ou Wikipedia…

    D’ailleurs, prenons l’exemple de Wikipedia. J’en suis fermement partisan. Mais elle ne remplace pas l’encyclopédie universalis. J’ai besoin d’expliquer aux étudiants l’intérêt et le fonctionnement de cette dernière mais je ne perd pas mon temps à leur signaler la première : ils ne m’ont pas attendu pour l’utiliser. Au final, les deux sont complémentaires.

    @MsSz : renoncer à utiliser des trucs forts chers ne devrait pas être une source de stress pour les collègues si c’est pour remplacer par mieux et moins cher.
    A ce titre, je suis pour la reconnaissance du droit à l’erreur. Je crois que certains collègues rechignent à abandonner (voire continuent de défendre bec et ongles) de mauvaises solutions techniques, non pas parce qu’ils les pensent bonnes mais parce que leur responsabilité est engagée dans l’acquisition (à prix d’or) de celles-ci. La tension induite par l’évaluation de la performance individuelle (très au goût du jour) dramatise cet enjeu : perdre (ou pas) la face.

  10. @antmeyl : je ne compare pas Dalloz, etc. à GBS ou Dailymotion. Ils répondent à des besoins différents et il n’est pas nécessaire de les mettre en concurrence. Allez trouver sur Dalloz un mode d’emploi (screencast) sur ScienceDirect ou Zotero !
    Donc Youtube a son intérêt, et il n’est pas dit que les étudiants y pensent.
    Pour Wikipedia, je ne suis pas sûr que tous les étudiants que j’aie eu entre les mains aient eu par exemple le réflexe de cliquer sur le lien “English” en bas à gauche des articles qu’ils consultaient : pourtant — surtout en sciences — c’est bon à savoir.
    Il y a des outils disciplinaires adaptés aux étudiants (WoS, Pubmed, etc.) et il faut les former à ça.
    Si on a le temps, on peut aussi leur signaler que les outils qu’ils utilisent pour se distraire peuvent parfois avoir un intérêt documentaire.
    Pourquoi opposer les deux ?

    Non, la Wikipedia ne remplace pas l’Universalis. La réciproque est vraie : tous les Nobel 2008 sont dans la Wikipedia (la mort de Claude Berri aussi — et je l’affirme sans être allé vérifié).
    Leur contenu est différent, et structuré différemment
    D’ailleurs, ce ça aussi j’avais déjà parlé.
    Au fait, qu’est-ce que je fous à blogger ici ? Je retourne chez moi !

  11. A chaque outil son usage.
    L’OPAC sert à localiser (comme un bonne vieille liste avec un plan)
    Les bases juridiques à trouver législation, jurisprudence, doctrine
    Pubmed des références bibliographiques d’articles médicaux
    TripDdatabase des références EBM
    etc. etc.

    Google tout ça si on le temps et la recette d’un gâteau au chocolat et d’un carry poulet, et de ne pas gérer ses favoris, et de plein de choses…

    Ne méconnaissons pas les usages de nos étudiants : clairement, ils ne cherchent pas de la jurisprudence pour le plaisir (y a que Maître Eolas pour faire des trucs comme ça), mais parce que ça leur est prescrit par les études qu’ils ont choisi de faire. Même chose pour Pubmed et consorts.
    Rapprochons nous des prescripteurs, comprenons les usages, ciblons, associons-nous…

    et sortons de ce débat assez stérile sur quels outils privilégier. C’est dans la rencontre des outils et d’une analyse des besoins qu’est la plus value avec l’idée de faire gagner du temps à tous, plutôt que de fourguer “nos trucs” (quels qu’ils soient) : des exemples ==> http://news-libraries.mit.edu/blog/category/events/classes/

    On y arrivera un jour, on y arrivera.

  12. A partir du moment où on propose des outils (flux RSS, export des notices vers Zotero, blog), il parait normal et même légitime de former nos usagers à l’utilisation de ces outils, sinon on ne s’étonnera pas de leur non-utilisation.
    Développer les info-compétences, informer sur l’évolution des pratiques documentaires doivent maintenant faire parti de nos missions.
    Sinon, Youtube ça sert aussi à Stanford pour diffuser ses cours : http://www.youtube.com/user/stanforduniversity

  13. Bonsoir,

    Je crois qu’un des soucis vient aussi que la majorité des formateurs se sentent rassurés en formant sur un outil fermé (un portail fermé, nouveau concept !) qu’ils pensent maîtriser parfaitement.
    Comme les outils du web évoluent en permanence, c’est peut-être cette ouverture (et le fait d’avoir lors de la formation un résultat à l’écran qui a changé dans ces menus, son ergonomie, etc…. par rapport au diaporama utilisé) qui poussent les personnes à ne pas se bousculer pour former sur ces outils…..

    @MxSz : Je te rassure, je ne vois pas d’inconvénient à ce que les “ressources qui ont coûté fort chères” ne soient pas valorisée : il faut savoir se remettre en question et renoncer à garder une solution si on se rend compte qu’elle est mauvaise….. (mais tout le monde ne le voit pas comme ça 😉 )

  14. @ Ely:

    “il faut savoir se remettre en question et renoncer à garder une solution si on se rend compte qu’elle est mauvaise”

    ok, on est bien d’accord.

    Sauf que dans la vraie vie, ça ne se passe pas comme ça :-). C’est comme le catalogage (pour les BAS) ou les acquisitions (pour les conservateurs) :il y a des gens qui n’ont fait, et qui ne continue à faire que cela au quotidien. Introduire des changements – de perspective globale sur les métiers, dans les compétences demandées, dans la gestion quotidienne, etc. -, ça ne se fait pas à coup de yaka, ou en opposant les anciens aux modernes (je ne dis pas que ce c’est que vous avez dit, hein, mais c’est aussi un discours qu’on peut entendre. Pas ici, t’inquiète pas DBO, on sait qu’t’es humain, toi !

    Enfin, tout à fait d’accord avec vous sur le besoin des formateurs de rassurer avec des zolis diaporamas aux contenus bien ficelés. Si on veut réussir les formations en bib, trois ingrédients : de la pratique, de la pratique, de la pratique.

  15. @lully : que nous puissions former nos usagers aux outils qu’ils utilisent en permanence, si ces outils peuvent avoir un angle d’attaque documentaire serait idéal.
    @Davidolib : former nos usagers à l’utilisation de tous les outils que nous proposons est nécessaire

    Le vrai défi est de trouver les formateurs et surtout de dégager le temps de travail nécessaire à mettre en oeuvre ces formations auprès des nos usagers.
    En multipliant les outils, on multiplie les besoins de formations/de formateurs (et de compétences techniques selon les outils en question) dans un contexte où le personnel ne se multiplie pas 🙂

    D’où une équation à résoudre en terme d’organisation du travail de l’équipe : plus de tâches avec autant de personnel, quels choix adopter?

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