OPM (Open Porte-Monnaie)

closeUne année au moins est passée depuis la publication de ce billet qui peut donc contenir des informations un peu datées.

Nouveau rendu de devoir de vacances et, comme j’ai le choix, je prends le plus facile, soit broder sur ” Votre bibliothèque dispose d’un budget illimité. Comment envisagez-vous l’avenir ?

Je vais de suite dire le fond de ma pensée : je pense réellement que la question du budget est globalement un faux problème sauf quand, comme le disait un de nos récent visiteurs venu du Turkménistan, le budget global de la bibliothèque est de 6000 euros (véridique)… Mais là, nous parlons de Bu et de Bm, qui disposent malgré tout de budgets légèrement plus conséquents.

Pourquoi est-ce que je pense que le budget est un faux problème ? Parce que, dans le domaine qui est le mien, et exception faite de l’offre documentaire numérique parfois chère (mais alors, cela – la question de l’offre documentaire numérique d’importance – concerne les Bu qui ont donc des budgets, faut pas déconner), la bibliothèque numérique peut ne pas coûter cher.

Je ne vais pas tout lister (je parle souvent de tout cela ici), mais quand même :

  • nous avons des SIGB libres et gratuits (citons simplement Koha et PMB)
  • nous pouvons monter des OPAC sympas et gratuits avec WordPress et Scriblio, par exemple
  • l’OAI fait circuler gratuitement des tonnes de ressources
  • des moteurs fédérés OpenSource existent et fonctionnent
  • la musique est présente aussi avec Deezer, LastFm et Cie
  • des SRV peuvent être construits de rien avec Meebo
  • etc.

Donc, sans en faire des tartines et pour répondre à la question : avec un budget illimité, j’envisage l’avenir avec sérénité. Mais avec un budget plus serré, aussi…

Parce qu’il me semble que tout cela relève plus de choix politiques y compris locaux (i.e. au niveau de la bibliothèque) que d’argent. Parce que tout cela relève plus d’énergies locales que de zéros sur des chèques. Parce qu’on peut toujours choisir de prendre des virages, ou pas, même s’il est souvent tentant (pour des raisons personnelles et/ou structurelles, voire les deux en même temps) de continuer à faire ” comme avant “.

Voilà, c’est abrupte, mais c’est ce que je pense. Et ça n’engage que moi.

PS : tout de même : avec un budget illimité, je lâche 30 développeurs/designers/webmestres/bibliothécaires sur tous les projets de fous qui leur passent par la tête pour pondre la bibliothèque (numérique, ou pas d’ailleurs) de demain.

Open-bar, Open-pizzas, Open-barbes 😉

13 thoughts on “OPM (Open Porte-Monnaie)

  1. Le problème principal c’est le profil du personnel disponible.
    On a pas assez de personnes compétent en informatique et également de vrais informaticiens.

    C’est super dur de se voir attribuer des heures de dev par le service info (car tous les services en veulent) et recruter des informaticiens pour une bibliothèque, ce n’est pas toujours facile car travailler en bib pour un informaticien, c’est incongru (ou pas sexy ou on peut pas les payer mieux qu’un bibliothécaire) ou interdit (car les informaticiens ne peuvent appartenir qu’au service informatique).
    On a déjà tenté de démontrer que la masse de données et systèmes qu’on manipulait était supérieur au volume de données de la compta, des RH et de la gestion étudiants réunis mais sans grand succès. La bibliothèque pour beaucoup de décideurs (malheureusement), c’est un stock de livres (qui sert de moins en moins) et qui prend trop de place dans ces bâtiments qui coutent si chers (et pour les BdD, ce n’est qu’un bon de commande qu’on signe et l’interface provient de l’éditeur 😉 ).

  2. Mouais.

    Tout cela me fait penser à ce post d O. tacheau (http://tacheau.wordpress.com/2008/04/08/mary-a-tout-prix/), qui comparait les budgets du SCD d’Angers et de la bibliothèque de l’Université d’Etat des Appalaches, et n’en tirait aucune conséquence, hormis sur un mode ironique (désolé M. Tacheau, j’aurais dû réagir directement à votre message quand il a paru, mais je n’avais pas pris le temps de le faire).

    Je trouve extrêmement dérangeant que les questions budgétaires soient totalement, dans ton post Daniel, comme dans celui d’OT, comme encore chez Nicomo avant la fermeture de son blog, dépolitisées. A vous lire, l’argent n’est pas un problème. Où s’il l’est, c’est un problème technique.

    Or, on pourrait très bien envisager de mobiliser les “énergies locales” en demandant AUSSI plus de zéros sur les chèques.

    Plus de zéros sur les chèques, cela permettrait par exemple de renouveler les contrats des personnes engagées en CDD pour qu’elles puissent aussi bénéficier de congés payés, comme cela a été le cas par exemple pour une personne dans notre établissement (elle travaille depuis septembre 2007 ; son contrat s’est arrêté fin juin, elle va être réembauchée début septembre. La classe).

    Plus de zéros sur les chèques, cela permettrait aux universités de cotiser enfin aux ASSEDIC. La plupart ne le font pas pour une raison très simple : cela permet de ne pas avoir de cotisations chômage à régler pour les personnels qui ont été embauchés comme vacataires. Les étudiants ont des contrats de quelques mois, puis sont remplacés par d’autres. A Lyon 2, en 2006, le budget pour les étudiants moniteurs était de 150 000 euros, si mes souvenirs sont bons (et si un lyonnais veut bien confirmer ou infirmer mes propos, pas de problème). Il y avait deux campagnes de recrutement par an, donc autant d’entretiens à faire passer, de lettres de motivation à éplucher, de formation à assurer pour assurer un service public correct. La contractualisation de l’emploi en BU, c’est aussi ça: emplois étudiants au rabais, un peu d’heures par ci, un peu d’heures par là…

    Plus de zéros sur les chèques, cela permettrait aussi de se donner les moyens d’acquérir des collections numériques digne de ce nom. Excuse-moi Daniel, mais écrire “cela” (“mais alors, cela – la question de l’offre documentaire numérique d’importance – concerne les Bu qui ont donc des budgets, faut pas déconner”), ça à mon avis, c’est une connerie. Surtout quand on apprend que la bibliothèque de l’université d’Etat des Appalaches “possède quand même 10 fois plus de bases de données qu’à Angers (140 au total)” (OT, post cité). Donne les prix, Daniel. Dis-nous un peu quelle part du budget les périos électroniques en sciences de la vie et de la matière occupent-ils dans votre budget.

    Plus de zéros sur les chèques, cela permettrait de disposer de nouveaux locaux pour des Bu qui sont dans une situation scandaleuse. Avez-vous déjà été sur le campus de Lille 3 ? Même chez nous, où les locaux ont 10 ans, il y a déjà des problèmes de conception, d’adaptation aux nouveaux usages des étudiants.

    Moi, j’ai certes l’impression que les Bu ont encore beaucoup à gagner en améliorant les services internes, en profitant des services open source, etc. Moi aussi, au niveau local, j’essaye de mettre en place, avec les collègues, de politiques documentaires, des indicateurs, etc.
    Il n’empêche. A force d’affirmer que l’argent n’est pas un problème, on va finir par vous croire.

  3. @MxSz : ouh là, pas d’amertume entre nous. Je me suis sans doute mal exprimé : je pense que l’on peut faire plein de choses sans dépenser d’argent, et que parfois, le manque de crédit permet de ne rien faire à bon compte – si je peux me permettre. Mon billet voulait juste souligner cela, cette démarche vue souvent de ne rien essayer de faire sous prétexte de crédits insuffisants.

    Evidemment, plus de crédits, c’est mieux, plus confortable, et ça permet tout ce que tu dis et souligne avec raison. Evidemment, personne ne cracherait sur plus d’argent. Mais tes exemples sont surtout sur la bib. physique : je parle de numérique. Mettre un widget meebo dans son opa ou sur son site, réellement, ça ne coûte rien.

    Mon propos est donc : oui, des gros crédits, c’est bien et mieux. Mais oui aussi, on peut faire des trucs bien avec de plus petits crédits, et/ou en réfléchissant à ce que l’on fait de ses crédits pour peut-être les utiliser autrement. L’argent n’est pas le nerf de la guerre, puisqu’on peut aussi se battre à mains nues 😉

  4. Affirmer que la question des budgets est un faux problème me semble réducteur. Certes, on peut faire de bonnes choses avec de plus petits crédits. Mais beaucoup moins qu’avec de gros. Parce que les ressources électroniques coûtent cher, quoiqu’on en puisse dire, et que toutes les BU n’ont pas les moyens de payer ce qu’elles voudraient pouvoir offrir à leurs étudiants ; parce que cet achat, quand il a lieu, se fait au détriment d’autres ressources. Parce que, dans le cadre de la conception et de l’enrichissement d’une bibliothèque numérique, si l’on veut pouvoir numériser nos collections papier les plus consultées, il faut avoir un budget. Parce que si l’on veut offrir un maximum de services à nos lecteurs, il faut du personnel pour les développer (ne serait-ce qu’une personne chargée de la veille documentaire sur les disciplines de la bibliothèque et faire connaître aux lecteurs toute cette documentation gratuite qui traîne sur la toile). Et pour toutes les raisons qu’avance MxSz aussi.

    Quelque chose m’a un peu choquée dans ton raisonnement : le raccourci concernant “les SIGB libres et gratuits”. Un SIGB libre est rarement gratuit (coût de fonctionnement, développement de fonctionnalités spécifiques, reprise de données lors de la réinformatisation, tout cela a, me semble-t-il, un coût. Je pense par exemple au développement d’une routine SUDOC pour Koha, qui n’existe pas, à ma connaissance, à l’heure actuelle). Moins cher, certes, mais gratuit, non.

  5. @Fanny : en gros, presque les mêmes réponses qu’à MxSz, avec cette précision : le format blog fait que je vais vite et sans trop de nuances (en même temps, c’est ma manière de faire 😉 ) Encore une fois : oui, plus d’argent, c’est mieux. Mais moins n’empêche pas de faire.
    Sur le personnel : peut-être qu’il faut interroger certains profils et les faire évoluer ? A budgets constants, et personnels constants, on peut rendre des services nouveaux quand d’anciens services sont en voie de… disons, ralentissement. Je ne crois pas qu’il faille sans cesse plus de monde. Pas quand certains besoins n’existent plus. Et je m’en persuade à chaque fois que je suis dans une bibliothèque : nous avons des marges de manoeuvre.

    Sur les SIGB libres et gratuits, là aussi, je suis allé vite. Mais, sur ton exemple : combien va coûter le développement de la routine dans un SIGB propriétaire ? (De plus, il y a de fortes chances pour que ladite routine soit ensuite facturée à tous les clients). D’ailleurs, c’est un bon exemple : un SIGB libre peut permettre des économies (même si effectivement il n’est pas gratuit) et l’argent économisée peut être injecté ailleurs. Mais c’est tellement plus facile de partir sur du propriétaire…
    En fait, ce que j’interroge dans ce billet, ce n’est pas la question des budgets, c’est la question de notre volonté de faire bouger/évoluer les choses ; les moyens que nous mettons en oeuvre ; les raisons (bonnes ou mauvaises) que nous pouvons trouver pour ne pas changer et, par exemple, continuer à être abonnés à des tonnes de revues papier qui ne sortent jamais (tout le monde a des exemples 😉 )

    Enfin, sur les budgets, plus généralement : s’ils sont insuffisants (oui, je veux bien l’admettre), alors allons chercher le grisbi là où il est : c’est donc le moment de commencer à réfléchir au Fundraising… Je me souviens très bien, Fanny, du jour où, à l’ENSSIB, l’on nous a présenté le projet du Learning Center de l’Ecole Polytechnique de Lausanne, et où le fait que les fonds venaient pour moitié d’une société privée (Rolex, je crois) avait provoqué des réactions assez vives. Et bien moi, je ne vois pas où est le problème… Rolex a des crédits ? Eh bien prenons les crédits de Rolex, au moins, cela mettra les pendules à l’heure 😉

    Allez, je cesse là. Amitiés.

  6. Je trouve que dans ton argumentaire, le contenu est plus qu’accessoire. L’OAI est effectivement très intéressant, les réservoirs comme HAL et autres contiennent des merveilles, mais à l’heure actuelle (cela peut évoluer et c’est souhaitable), les lecteurs semblent préférer consulter leur(s) revue(s) préférée(s) plutôt qu’un dépôt d’archives ouvertes. Par ailleurs, pour les revues en open access, c’est sensiblement la même chose. Si Plos Biology est la revue de sa catégorie avec le plus fort facteur d’impact, il reste qu’il est inconcevable de ne pas être abonné à Nature. Le gratuit, le libre, l’ouvert n’exclut pas le payant.
    Faisons maintenant un peu de mauvais esprit. Avec un budget de 6000 $ par an, l’argent n’est effectivement pas un problème pour une bibliothèque du Turkménistan. Pour la somme TTC de 0$, elle peut avoir accès à plus de 6000 revues scientifiques publiées par des éditeurs “conventionnels” dans les domaines de la santé, de l’agronomie ou des sciences de l’environnement grâce aux programmes HINARI, OARE et AGORA et peuvent aller s’amuser avec OAIster.(Malgré tout, même si je ne connais pas la qualité de la bande passante en Asie Centrale, je suppose que les accès à cette manne doivent être plus que difficiles, mais c’est une autre question).

  7. Dans le désordre : je suis bien d’accord sur l’idée de budgets “extérieurs”. D’ailleurs ma bibliothèque a recours à l’appel aux mécènes pour financer certains projets, et je n’aurais pour ma part aucun scrupule à accepter de l’argent venant de Ricard ou de n’importe quelle société (je cite cette marque car elle avait provoqué une discussion lors d’un de mes cours antérieurs à l’ENSSIB). Pour autant, je pense que ce n’est pas acquis en France et qu’il faudra bousculer sacrément les idées reçues pour y arriver. Mais arès tout nous sommes là pour ça, non ? Du moins, j’aime à le croire.

    Sur les SIGB libres : bien entendu, ils sont moins chers, bien que selon les contraintes des bibliothèques, le budget d’investissement puisse être conséquent. Les économies faites sur le long terme sont importantes. Notamment parce que les développements faits par une bibliothèque peuvent servir à une autre (et je pense là encore à la routine SUDOC ; une fois qu’elle sera mise en place, toutes les bibliothèques pourront en profiter). Je te reprochais juste ta formule trop laconique, que je trouve dommageable pour un blog influent dans la sphère des bibliothèques.
    Pour reprendre tes mots : “c’est tellement plus facile de partir sur du propriétaire”, eh bien là pas d’accord. Et je ne pense pas que ceux qui ont eu affaire à des représentants de sociétés de SIGB propriétaires me contrediront.

  8. @Benjamin : encore un bon exemple, que l’OAI. Nous nous plaignons que les choses sont comme elles sont (i.e. que les chercheurs préfèrent encore les revues payantes) et que cela nous coûte des fortunes. Certes. Mais que faisons-nous concrètement (je m’inclus dans le lot) pour expliquer aux chercheurs les énormes avantages de l’Open Access ? Et pourquoi est-il ” inconcevable de ne pas être abonné à Nature ” ? Tout est concevable à l’esprit humain, non ?
    Bon, apparemment, ce billet crée du débat. C’est parfait. Je crois qu’il faut interroger nos pratiques (et je m’inclus dans le lot) tous les jours 😉

  9. @ Fanny : un bib sponsorisée par Ricard ?? Excellente idée, les parasols seront offerts et nous pourrons créer des terrasses extérieures à peu de frais 😉

    Oui, moi aussi, j’aime à croire que nous sommes là pour bousculer et que l’on nous bousculera.

    Sur le laconisme : je trouve déjà que je parle beaucoup trop (ce qui, paradoxe, ne me fait pas taire 😉 ). Mais vraiment, c’est une question de forme bloggique. Sur l’influence, j’ai vraiment des doutes mais peu importe, je dis les choses comme je le pense (parfois un peu vrac) 😉

    Sur le propriétaire, je maintiens. A une autre échelle, regarde les difficultés qu’il peut y avoir à faire passer de Word à OpenOffice…. On trouve Word pourri, cher, etc… mais Word reste largement implanté alors que rien, mais alors rien ne le justifie. Mais l’on pourrait discuter à l’infini. Peut-être, autour d’un… Ricard ??? 😉

  10. Je ne pensais pas que mon sujet créerait une telle ébullition 😉
    C’est marrant, quand je l’ai posé, j’avais plutôt à l’esprit ce qu’on pourrait imaginer comme locaux novateurs, ce qu’on pourrait offrir comme services différents (un livre emprunté, un ricard offert pour reprendre l’exemple ci-dessus ;-)), etc.
    Le illimité voulait dire “vous avez des sous ? Lâchez-vous !” et voilà que vous revenez tous au catalogue, rhâââ ! Serais-je donc trop fantasque pour ce métier ?

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *